Egora-le Panorama du Médecin : Pourquoi de nouvelles recommandations ?
Pr Chantal Raherison : La prévalence de l’asthme dans la population française reste stable. Chez l’adulte, elle est estimée à 6.4% avec une prévalence plus importante chez les femmes après l’adolescence. On estime à environ 850 le nombre de décès par an liés à l’asthme. L’idée de ces nouvelles recommandations était qu’il était nécessaire d’avoir une continuité dans la prise en charge de l’asthme de l’enfant puis de l’adolescent et de l’adulte. C’est pourquoi, ces recommandations ont été élaborées avec les pneumo-pédiatres et se divisent en deux parties, la première partie concernant l’adulte a déjà été publiée et celle concernant la pneumo-pédiatrie va suivre dans quelques semaines. Le fil conducteur a été de répondre aux questions que pouvaient se poser nos collègues de la médecine générale, ce qui n’avait jamais été fait. C’est pourquoi on l’a libellé sous forme de questions.
Quels conseils donner pour une suspicion d’asthme en médecine générale ?
La première question à se poser est comment porter le diagnostic d’asthme ? Nous avons envisagé les différentes possibilités selon qu’il y ait une probabilité clinique forte ou faible et, point important, selon qu’on ait accès ou non à la spirométrie car malheureusement aujourd’hui de nombreux médecins n’y ont pas accès. Ainsi, nous proposons quatre algorithmes en fonction de la probabilité clinique et en fonction de l’accès ou non à la spirométrie pour guider le médecin traitant.
Dans un premier temps, on traite le patient sur un diagnostic probabiliste et idéalement, le patient devrait avoir une spirométrie dans les trois mois pour confirmer le diagnostic.
Nous avons également réhabilité le débit expiratoire de pointe qui avait été longtemps décrié, même laissé de côté. Le médecin traitant peut tout à fait faire une épreuve de réversibilité sur un débit expiratoire de pointe quand il n’a pas accès à la spirométrie.
Quelle est la place du bilan allergologique dans l’asthme ?
Tout patient asthmatique doit faire un bilan allergologique dans sa vie. En effet, cela peut modifier la prise en charge que ce soit en termes d’indication de l’immunothérapie ou de désensibilisation ou, dans le cas de certains asthmes sévères allergiques, aider au choix de la biothérapie. Nous conseillons de le faire précocement sans que cela soit une urgence bien évidemment. Il doit cependant être inclus dans le bilan de tout asthmatique.
Que préconisez-vous pour le traitement de fond ?
Nous maintenons notre position. La prise en charge du traitement de fond de l’asthme ne change pas et nous nous sommes donc écartés des recommandations thérapeutiques internationales du Gina qui font une croix sur les bronchodilatateurs de courte durée d’action alors qu’il n’y a aucun niveau de preuves à ce sujet. De plus, le Gina recommande un traitement unique pour tout le monde, c'est-à-dire l’association fixe formotérol-corticosteroïde. Le niveau de preuves nous paraît insuffisant. Nous avons donc gardé...
l’ascension thérapeutique telle qu’on la connaissait avec la corticothérapie inhalée associée à un bronchodilatateur de longue durée d’action si nécessaire. A noter que l’agence du médicament européenne et la FDA n’ont pas émis d’alerte sur les bronchodilatateurs de courte durée d’action dans ce cadre.
Et pour les exacerbations ?
Les médecins traitants sont parfois confrontés à des exacerbations, surtout en période hivernale. Il arrive qu’ils ne voient les patients qu’à cette occasion. Nous avons donc standardisé et simplifié le traitement de l’exacerbation en rappelant les signes de gravité qui étaient déjà connus et notifiés dans les précédentes recommandations mais en les simplifiant.
La nébulisation n’étant pas accessible en médecine de soins primaires, nous préconisons un équivalent d’aérosol, c’est-à-dire des sprays de bronchodilatateurs de courte durée d’action dans une chambre d’inhalation.
La corticothérapie générale garde sa place, mais nous insistons sur le fait qu’il n’est pas nécessaire de dépasser 0.5 mg/kg/j voire 1 mg/kg/j. Des doses supérieures n’ont pas fait preuve de leur efficacité mais s’accompagnent de plus d’effets secondaires. Et il n’est pas indiqué de prescrire des doses dégressives pour des cures courtes de 7 jours.
Et concernant la femme enceinte ?
Ce chapitre a été ajouté pour rassurer. Il n’y pas de médicaments tératogènes. Il y a plus de risques à sous-traiter les femmes car les exacerbations entrainent un risque pour elles-mêmes et d’hypoxie fœtale. L’objectif au cours de la grossesse est de garder un asthme contrôlé. Si une femme a un asthme contrôlé avant la grossesse, ou au début de grossesse, ce n’est absolument pas le moment de diminuer le traitement.
Que pouvez-vous nous dire sur les conseils en matière d’environnement ?
L’asthme reste une maladie environnementale et même s’il existe des traitements, si on ne pense pas à faire l’éviction des éléments déclencheurs au niveau environnemental, les patients asthmatiques resteront mal contrôlés. Le bilan environnemental au domicile est important, tout comme la connaissance de la profession du patient pour éviter de passer à côté d’asthmes professionnels qui sont sous diagnostiqués. L’accès à un conseiller médical en environnement en fonction du territoire serait l’idéal mais à défaut, nous avons rappelé les principaux polluants et les pesticides qui n’étaient pas mentionnés jusqu’à présent comme pouvant déclencher des crises d’asthme.
* Le Pr Raherison-Semjen déclare participer ou avoir participé à des interventions ponctuelles pour : ALK, Astra Zeneca, Chiesi, GSK, Novartis, Mundipharma, et Sanofi.
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