Depuis l’annonce le 15 février dans la revue Nature de plus de 80 essais cliniques contre le coronavirus, l’attente se fait chaque jour plus pressante sur leurs résultats. Les traitements qui suscitent le plus d’espoir sont le remdesivir (un antiviral expérimental testé initialement contre Ebola), l’association lopinavir/ritonavir (deux antirétroviraux prescrits en combinaison contre le VIH) et la chloroquine (un antipaludéen). Ces molécules ont montré des résultats préliminaires prometteurs contre le coronavirus. "Pour l’instant, ce sont des pistes", tempère le Pr Daniel Floret, président du Comité Technique des Vaccinations (CTV) au Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP). Il n’empêche, des pistes d’autant plus sérieuses que ces médicaments existent déjà : "ils ont tous (à part le remdesivir, NDLR) une autorisation de mise sur le marché (AMM) et sont disponibles dans le commerce, détaille Daniel Floret, mais pour d’autres indications". Ils sont donc déjà en phase 3 d’essai clinique, et leur mécanisme potentiel d’action est connu.
Ces antiviraux sont supposés agir à différentes étapes clés du cycle de réplication du coronavirus : blocage de la fusion du virus avec les cellules via une augmentation du pH de l’endosome par la chloroquine, perturbation de la réplication de l’ARN viral par l’analogue de nucléotide remdesivir, et inhibition de la protéase nécessaire à la maturation des protéines virales par l’association lopinavir/ritonavir. "D’autres produits sont en développement" ajoute Daniel Floret. Même l’effet de la médecine chinoise est investigué sur une cohorte de malades ! Les résultats d’efficacité de tous ces traitements viendront surtout de Chine : "En France, nous aurons du mal à mettre en place des essais cliniques convaincants vu le nombre de cas". Sérothérapie et anticorps monoclonaux à l’étude La sérothérapie est une autre piste curative explorée. "Les chinois recueillent le plasma de patients rétablis du Covid-19 pour en extraire les immunoglobulines. Comme ils ont récemment guéris, leur taux d’anticorps spécifiques du coronavirus est sûrement très élevé. Ces anticorps sont ensuite transfusés à des malades." Pour disposer d’assez d’immunoglobulines, cette méthode requiert une cohorte suffisamment importante de personnes guéries... que la France n’a pas : « les centres de don du sang français ont la capacité de recueillir ces anticorps, mais il n’y a pas suffisamment de patients guéris. » Un dérivé de la sérothérapie est également à l’essai : la synthèse d’anticorps monoclonaux. "C’est une technique de génie génétique. On recueille les antigènes du coronavirus, puis on les administre à un animal afin d’obtenir des anticorps qui lui sont spécifiques. Ces anticorps sont ensuite humanisés pour être tolérés par l’homme, puis fabriqués par des organismes génétiquement modifiés pour être utilisés à titre thérapeutique. C’est une idée thérapeutique déjà utilisée contre Ebola". Par exemple mAb114 est un anticorps monoclonal en phase de test contre le virus africain. Solution rapide face à un pathogène inconnu, la sérothérapie ne peut cependant se targuer, selon Nature, que de "succès modestes" ces dernières décennies face à d’autres virus. Pour les vaccins,"on part de zéro" Et qu’en est-il des traitements vaccinaux ? "Il ne faut pas se faire d’illusions, on ne peut pas mettre au point un vaccin en quinze jours, assène le président du CTV. Il y a fort à parier que les vaccins arriveront après le pic de l’épidémie. Avec la grippe A-H1N1, des vaccins maquettes de la grippe étaient pré-enregistrés, il suffisait d’y remplacer l’antigène utilisé contre le H5N1 par l’antigène du virus pandémique. Malgré cette préparation, la pandémie de grippe A a démarré au mois d’avril et la vaccination à partir de novembre. Alors que dans l’épidémie actuelle, on part de zéro."
"Le coronavirus de Wuhan est de la même famille que le MERS-CoV, qui circule au Moyen-Orient depuis quelques années et pour lequel il n’y a toujours pas de vaccin malgré de nombreuses recherches." Les études concernant le coronavirus sont sur tous les fronts : vaccin tué, vaccins atténués vivants, vaccins à ADN, vaccin à vecteur viral… "L’institut Pasteur travaille sur un vaccin à vecteur viral contre le coronavirus, en utilisant comme vecteur le virus atténué de la rougeole présent dans le vaccin ROR. Mais on n’en est qu’au stade de mise au point d’un candidat vaccin chez des modèles animaux." Et un problème de taille subsiste : "le coronavirus est surtout agressif chez les personnes qui ont des problèmes immunitaires, celles qui réagissent le moins bien aux vaccins", souligne le Pr Floret.
Pour l'heure, en l’absence de traitement ou de cure certaine, fions-nous aux gestes barrières. Car une certitude demeure : mieux vaut prévenir que guérir…
Le diagnostic d’infection par le coronavirus se fait par un test PCR, une technique de biologie moléculaire permettant d’amplifier des fragments d’ADN spécifiques du coronavirus. Développé par le centre national de référence "virus des infections respiratoires" de l’institut Pasteur, il consiste à dépister le matériel génétique viral dans un prélèvement biologique : secrétions pharyngées, expectorations… "L’objectif est de rendre la technologie du dépistage accessible également aux laboratoires de CHU" explique Daniel Floret. Objectif dépassé dès le 8 mars, avec la parution au journal officiel d’un décret autorisant les laboratoires de ville à réaliser les tests diagnostiques. Le test de dépistage est "très efficace", à partir du moment où le virus est excrété (c’est-à-dire après qu’il s’est répliqué dans les cellules jusqu’à atteindre un niveau détectable). Le virus est donc détectable lorsqu’apparaissent les premiers signes cliniques. Mais une question de taille demeure : Le virus est-il déjà excrété, et donc transmissible, avant que la maladie devienne symptomatique ? "On craint que ce soit le cas, sans en avoir de preuve absolue, précise Daniel Floret. Cela limiterait beaucoup l’efficacité des gestes barrières."
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