Enquête de pharmacovigilance sur le Levothyrox : certaines constatations restent inexpliquées
Selon les premiers résultats de l’enquête de pharmacovigilance, les effets indésirables observés témoignent d'un déséquilibre thyroïdien en lien avec le changement de traitement. Leur nombre et leur survenue indépendamment des taux de thyroxine interpellent cependant les auteurs de l’étude.
Suite au changement de formulation du Levothyrox, une enquête de pharmacovigilance a été initiée lors de la mise sur le marché de la nouvelle formule en mars 2017. Cette enquête vise à analyser les signalements d’effets indésirables rapportés. Les résultats intermédiaires viennent d’être publiés par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Ils ont été présentés lors du Comité technique de pharmacovigilance (CTPV) du 10 octobre 2017.
Un nombre "inédit" de signalements
Cette enquête rapporte tout d’abord que 14 633 signalement d’effets indésirables ont été rapportés à l’ANSM, sur la période allant de fin mars au 15 septembre, une chiffre "inédit", soulignent les auteurs, "avec un possible effet amplificateur du portail de signalement et des réseaux sociaux". Cela représente 0,6% de la totalité des 2,6 millions de patients traités par Levothyrox nouvelle formule. Sur ce total, les cas graves, c’est-à-dire déclarés par les patients comme ayant des conséquences sur la vie familiale, professionnelle ou sociale, et les cas les plus documentés, soit 5 062 cas, ont pu être enregistrés prioritairement dans la base nationale de pharmacovigilance (BNPV). Ces dernières situations concernaient à plus de 90% des femmes. Les effets indésirables rapportés étaient principalement : une fatigue, des maux de tête, une insomnie, des vertiges, des douleurs articulaires et musculaires et une chute de cheveux, des effets "déjà connus avec l’ancienne formule du Levothyrox", précise l’agence.
Des effets attendus mais...
Les résultats confirment par ailleurs l’existence de déséquilibres thyroïdiens pour certains patients lors du passage de Levothyrox ancienne formule à Levothyrox nouvelle formule – effets qui étaient aussi attendus. Ce changement peut en effet entrainer "un réajustement du dosage qui peut nécessiter un certain délai", souligne l’ANSM. Le profil clinique des effets indésirables rapportés avec la nouvelle formule est donc semblable à celui de l’ancienne, assurent les auteurs de l‘enquête. L’ANSM considère donc au final que "tous les effets indésirables témoignent d'un déséquilibre thyroïdien en lien avec le changement de traitement ; aucun effet indésirable d'un type nouveau, qui serait spécifique de la seule nouvelle formule, n'a été retrouvé".
...qui interpellent
Deux résultats interpellent cependant les auteurs de l’étude : la fréquence inattendue de signalements ; et la présence de signes cliniques identiques chez les patients, qu’ils soient en hypo-ou hyperthyroïdie, et même chez des patients présentant des TSH dans les normes biologiques. Ces éléments doivent être "discutés" avec "l’ensemble des parties prenantes (professionnels de santé et patients) au sein d’un groupe ad hoc", précisent-ils. Ils reconnaissent, enfin, un déficit dans l’information des praticiens : ces effets indésirables "ont fait l’objet d’une communication de l’ANSM dès mars 2017 au travers d’un document Questions/Réponses mais sans doute insuffisamment connu des professionnels de santé et des patients", écrivent-ils dans leur rapport. Enfin l’ANSM a annoncé qu’un autre médicament sera prochainement mis à disposition des patients au mois de novembre. Il s’ajoutera à la L-Thyroxin Henning comprimé sécable du laboratoire Sanofi, qui est commercialisé en Allemagne ; à la L-Thyroxine Serb, solution buvable en gouttes, mais qui doit être réservée prioritairement aux enfants de moins de 8 ans, et aux personnes qui présentent des troubles de la déglutition; à l’Euthyrox (ancienne formule), disponible depuis le 2 octobre, pour une durée limitée ; et au Levothyrox nouvelle formule. Et d'autres médicaments pourraient être commercialisés en France ultérieurement, pour "étendre encore l'offre thérapeutique". Une enquête de pharmacovigilance lancée en mars 2017 est encore en cours. Ses résultats devraient être connus courant octobre.
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