"Racketteurs qui ne servent à rien", un professeur de psychiatrie ambitionne de dissoudre l'Ordre des médecins

21/12/2019 Par Mehdi Boudarene
Après les dysfonctionnements pointés par la Cour des comptes, l’Ordre s’est retrouvé dans l’œil du cyclone. Malgré les recommandations formulées par les Sages de la rue Cambon, l'ancien chef de service du CH de Saint-Etienne et fondateur de la Fondation Jean-Jaurès, Michel Debout estime que l’instance ordinale " ne peut se reformer par elle-même " et réclame sa disparition pure et simple.

Les " dérives préoccupantes " d’une instance qui fêtera ses 75 ans en 2020 doivent pousser ses responsables à une réforme en profondeur. La formule choc de la Cour des comptes n’a pas laissé de marbre le président Patrick Bouet qui a contesté publiquement les conclusions du rapport en mettant en avant les mesures prises pour moderniser l’instance. Si la parité envisagée pour 2022 est une bonne chose pour le Professeur Michel Debout qui reconnaît une évolution " un peu plus démocratique ", l’ancien chef de service au CHU de Saint-Etienne regrette le silence de l’instance concernant les cas d’agressions sexuelles. Une critique également adressée par la Cour qui considère que " plusieurs affaires relatives à des viols et agressions sexuelles sur patients ayant conduit à la condamnation pénale de médecins, n’ont pas été traitées, sur le plan ordinal, avec la rigueur nécessaire".

Indigné par la lecture du rapport de la Cour, le Pr Debout n’a pas de mot assez fort pour exprimer son ras-le-bol vis-à-vis d’une instance qui  ne lui sert à rien ". Auteur d’une tribune cosignée avec Daniel Balvetz, il qualifie les membres du conseil de" racketteur ". " En décembre 1974 nous avons été les premiers médecins à refuser de payer nos cotisations à l’Ordre, à la suite de la position d’une extrême violence qu’avait prise le Président de l’époque le Pr Lortat-Jacob, contre le vote par le parlement de la Loi Veil ", rappelle le Pr Michel Debout. Le psychiatre propose de lancer un mouvement exigeant la dissolution de l’Ordre et lance un appel à ses confrères. Il propose la création d’une instance régulatrice spécifique pour les médecins libéraux et un nouveau conseil de déontologie pour toutes les professions médicales. Michel Debout ne compte pas en rester là et annonce qu’il proposera un débat à l’Assemblée Nationale. Par ailleurs, il souhaite lancer une action de groupe pour exiger le remboursement de leur cotisation. " L’argent ne sert pas aux médecins mais pour quelques personnes dispendieuses (…) Que l’Ordre rende l’argent ! "


Pour la dissolution de l’Ordre des médecins face à un désordre affligeant
Extrait de la tribune du Pr Debout.
" (...) Nous avons aujourd’hui la démonstration, grâce au rapport de la Cour des Comptes, que cet organisme est non seulement "racketteur" mais nuisible pour la pratique des soins dans notre pays. C’est pourquoi nous appelons les pouvoirs publics à dissoudre l’Ordre des Médecins, à nommer des administrateurs provisoires pour la mise en œuvre des mesures transitoires, et la préparation dans le même temps d’une nouvelle Loi portant « Organisation de la Profession Médicale », qui devra être votée dans un délai raisonnable pour laisser la place à un débat parlementaire et citoyen nourri, car il en va de l’avenir de notre profession, pierre angulaire de notre système de santé. (...) Nous proposons pour notre part, que les questions d’organisation réglementaire et administrative soient séparées de la défense de la déontologie et des valeurs éthiques de la pratique médicale. Les médecins hospitaliers ont un statut qui règle et organise leur travail selon les principes de la fonction publique hospitalière, ils n’ont donc pas besoin d’être assujettis à un autre organisme (les médecins militaires eux ne l’ont jamais été !) ; par contre les médecins libéraux ont besoin, eux, d’une organisation spécifique, comme en ont besoin d’autres métiers. La défense de la déontologie et de l’éthique médicale devra être confiée à une instance spécifique, qui garantira un exercice médical dans l’intérêt des patients et de la santé publique, l’indépendance absolue des médecins en regard de tout pouvoir de quelque nature qu’il soit et d’abord financier, la liberté de prescription, le secret professionnel et l’impossibilité absolue de toute discrimination dans la pratique des soins."
 
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